C’est bientôt Noël. Alors pourquoi pas un conte de Noël ?

C’est certainement un miracle !  Est-ce Hanouka qui approche ? Est-ce Noêl  ? En tout cas nous venons de recevoir ce conte de Noël. D’où vient-il ? Du grand Nord ? Pourquoi pas ?  De l’Est européen en tout cas.Nous vous le livrons tel quel.

Misha le juif ukrainien

Un curieux Noël 2022  !

Si je vous dis que je m’appelle Misha, ça vous dit quelque chose ? Bien sûr que non !

Si je vous dis que je suis arrivé à la fin de l’été avec mes petits-enfants Mila et Grégori, fuyant la fureur russe qui s’est abattue sur l’Ukraine depuis le 24 février 2022, ça vous dit quelque chose ? Ca non plus, ça ne vous dit rien…
La guerre en Ukraine, c’est loin et puis, vous aussi, vous avez vos soucis. La vie n’est pas facile aujourd’hui.
Malgré tout, la fin de l’année approche et vous songez tout de même à préparer la fête, les fêtes…

Mila, Grégori et moi, nous avons beaucoup de mal pour survivre. Les enfants sont bien jeunes et moi, je me sens si vieux dans ce pays étranger. Oh, on ne nous a pas abandonnés. La ville où nous sommes arrivés nous a prêté une maison mais comment travailler quand on ne parle que l’Ukrainien et le Yiddish et quand il n’y a aucune communauté juive aux alentours ?

Oui, vous avez bien compris, nous sommes des juifs ukrainiens

Vous avez entendu parler d’Odessa ? Après ma naissance à côté de Medziborz (là où est enterré le Baal Shem Tov, le père du Hassidisme), mes parents sont venus habiter à Odessa, dans le quartier très juif de Moldavanka. C’est là que j’ai fait ma bar-mitsva.

Ah, Odessa était une bien jolie ville jusqu’à l’arrivée des Russes, mais attention, ne vous méprenez pas. Pour nous les Juifs, Odessa a été le meilleur et le pire, surtout au cours de la 2ème guerre mondiale. Nous avons été tant persécutés.
Mais, ce n’est pas le moment de vous attrister.
Parlons plutôt musique. Savez-vous qu’Odessa est le berceau de la musique klezmer ?
Au fait, la musique klezmer, vous connaissez ? Non ? Il s’agit de cette musique qui accompagne nos mariages, nos réjouissances. Deux ou trois musiciens, un violon, une clarinette, un cymbalum ou un accordéon et le tour est joué.
Moi, je me débrouille plutôt bien avec ma clarinette. Il faut dire que si j’ai du succès, c’est aussi parce que j’y mets tout mon cœur, même à mon âge !
Dans notre exil qui vient de nous conduire en France, j’ai réussi à mettre ma clarinette dans mes bagages et maintenant, le soir dans notre maison trop vide, je joue quelques airs familiers à mes petits-enfants. Cela leur rappelle nos réunions familiales si joyeuses. Quelquefois, cela nous fait pleurer…

Mais, attendez, ce n’est pas de cela dont je veux vous parler, non, non, mais bien plutôt, d’un événement singulier qui m’est arrivé, il y a peu de jours.

Avec tout ce que je viens de vous dire, vous avez compris que, dans mon cas, ce n’est pas bien facile de survivre à nos difficultés du moment et mes maigres économies fondent à vue d’œil ! Alors, j’ai cherché à me rendre utile, moyennant finances bien entendu ! Et savez-vous ce qui m’est arrivé ?
La petite ville dans laquelle je me trouve m’a proposé de déambuler dans les rues, habillé en Père Noël et de me faire photographier avec les enfants confiés par leurs parents. J’ai tout de suite accepté malgré le fait que Noël, ce n’est pas une fête pour nous, les juifs. Vous pensez, fêter la naissance d’un enfant, un des nôtres paraît-il… mais vous savez comme moi que sa venue a engendré tant de persécutions chez nous autres, les juifs.
Que dirait notre famille d’Odessa si elle me voyait ! Elle se souviendrait de mes moqueries à l’égard de ces traditions de Noël que je supportais si mal !…

A Odessa, dans notre quartier de Moldavanka, comme dans toutes les communautés juives de par le monde, nous fêtons en décembre la fête de Hanoukka. Vous connaissez ?
Nous faisons mémoire du miracle de la fiole d’huile préservée dans le Temple de Jérusalem, saccagé par les Séleucides.
Si vous ne connaissez pas, allez donc voir sur internet, Akadem ou Wikipedia et vous saurez tout…
Donc, notre tradition veut que tous les ans, pendant 8 jours, nous allumions chaque soir une bougie de plus que la veille et ces bougies doivent éclairer la nuit du monde. Oui, la règle c’est de poser, chaque soir, nos bougies allumées devant une fenêtre pour rappeler à notre environnement que la lumière de D.ieu est toujours là pour qui sait la voir et puis aussi pour remplacer les ténèbres de nos vies par l’espérance. C’est une belle fête je vous assure.

Mais voilà que cette année, pour ne pas mourir de faim, je vais célébrer Noël avec mon déguisement !!!
Et plus nous approchons de ce 25 décembre, et plus je m’en veux de favoriser Noël et de passer sous silence notre belle fête de Hanoukka. Qu’est-ce que je peux dire à mes petits enfants qui ne comprennent déjà pas pourquoi ils sont séparés de leurs parents, de leurs amis, sur cette terre inconnue ?
Pourtant, dans la rue principale, près de la Grand Place, là où les lumières brillent, là où une demi-douzaine de sapins font un arc de cercle en me tendant leurs bras scintillants et protecteurs, je ne me sens pas si mal même si cela me contrarie un peu de faire la promotion de Noël. Mais après tout, le Père Noël, ce n’est pas chrétien que je sache !.

L’autre jour, mes petits-enfants étaient à côté de moi et voilà que tout à coup, Mila s’est mise à chanter avec force le chant que nous chantons tous au moment de Hanoukka « Maoz Tsour, yeshua’ti, lekha… ».
Je l’ai regardé et je lui ai demandé :
« Pourquoi chantes-tu ce chant de Hanoukka. Ici, ça n’existe pas ! Tu vas mécontenter mes clients !! »
Alors, Mila s’est arrêté de chanter. Elle m’a regardé du haut de ses 9 ans et elle m’a répondu « Pourquoi, ne pourrait-on pas chanter Maoz Tsour ? C’est bien un chant qui célèbre la bonté de Dieu ? J’ai bien le droit… » a-t-elle ajouté…

Et c’est là que le miracle a commencé pour moi. Mila et ses camarades de classe, venus de tous les coins de la Grand Place, se sont donné la main et tous se sont mis à tourner autour de moi en chantant Maoz Tsour de leurs voix cristallines. Vous avez bien compris. A l’école, la maîtresse avait demandé à Mila de chanter quelque chose pour célébrer la lumière de Noël et Mila avait entonné Maoz Tsour. C’est ce qu’elle connaissait…

Et la solidarité humaine a fait le reste !!

Non seulement, mes clients n’ont pas été mécontents. Ils sont de plus en plus nombreux à me confier leurs enfants pour la photo souvenir et, figurez-vous que plusieurs familles chrétiennes nous ont invités tous les trois à un beau moment de rencontre le 8ème jour de Hanoukka qui coïncide, cette année, avec le lendemain de Noël.
Mila, Grégori et moi, nous allons leur raconter la belle histoire du miracle de Hanoukka et je crois qu’ils vont nous apprendre à regarder autrement la naissance de ce petit juif appelé Yeshoua par ses parents Myriam et Yosef…

Alors, belles fêtes à tous, Hag Sameah !!!

Misha

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